Cet article est une explication de texte Du Contrat Social de Rousseau. Il suit la chronologie du livre : le peuple, les lois, le gouvernement; et peut aussi servir de résumé.
Du contrat Social de Jean-Jacques Rousseau a pour objectif de trouver un régime politique juste et légitime.
L’homme est né libre, et partout il est dans les fers.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 1, Chapitre 1)
Rousseau critique les inégalités de son temps et ne croit pas à la pensée populaire que l’homme est un animal politique (Aristote), social, fait pour vivre en société; où certains seraient nés pour gouverner et d’autres pour obéir.
Pour lui, comme Hobbes ou Locke, les sociétés sont nées de conventions, c’est à dire d’un accord entre les membres d’un même peuple.
Avec le contrat social, Rousseau cherche d’abord à déterminer les termes de cet accord qui, dans toute logique, est antérieur à celui entre un peuple et un gouvernement.
Sommaire :
Qu’est-ce que le contrat social de Rousseau ?
Le contrat social scelle une union des forces entre des individus pour se protéger mutuellement et surmonter les obstacles auxquels ils font face. À la suite de ce contrat, ils deviennent associés et forment un peuple. En contrepartie, les membres de cette association acceptent une clause : l’aliénation totale de ses droits, c’est à dire de sa liberté pour former un tout, un moi commun.
Comme je me donne complètement, je n’existe plus en tant qu’individu, je fais parti d’un nouveau tout : le peuple.
À l’instant, au lieu de la personne particulière de chaque contractant, cet acte d’association produit un corps moral et collectif composé d’autant de membres que l’assemblée a de voix, lequel reçoit de ce même acte son unité, son moi commun, sa vie et sa volonté. Cette personne publique qui se forme ainsi par l’union de toutes les autres prenait autrefois le nom de Cité, et prend maintenant celui de République ou de corps politique, lequel est appelé par ses membres État quand il est passif, Souverain quand il est actif, Puissance en le comparant à ses semblables. À l’égard des associés ils prennent collectivement le nom de Peuple, et s’appellent en particulier citoyens comme participants à l’autorité souveraine, et sujets comme soumis aux lois de l’État. Mais ces termes se confondent souvent et se prennent l’un pour l’autre ; il suffit de les savoir distinguer quand ils sont employés dans toute leur précision.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 1, Chapitre 6)
Pourquoi se donner entièrement ? D’abord, pour éviter les inégalités. Si chacun donne la même part (sa liberté), alors nous sommes égaux. Pour rappel, on parle d’un pacte antérieur aux sociétés, il n’y a donc aucun privilège, aucun esclave… Notre seule possession : notre indépendance (et celle-ci est égale pour tous).
De plus, puisque maintenant je n’existe plus qu’à travers un tout, il n’existe plus d’intérêt personnel. Si je partage le même corps que mes associés, alors je n’ai aucun intérêt à vouloir du mal à mes associés. Ce serait me faire du mal, ce serait attaquer mon propre corps. Le pacte social nous force à réfléchir au bien commun, à l’intérêt général.
Sitôt que cette multitude est ainsi réunie en un corps, on ne peut offenser un des membres sans attaquer le corps ; encore moins offenser le corps sans que les membres s’en ressentent.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 1, Chapitre 7)
Telles sont les clauses du contrat. S’il venait à être violé, chaque membre retrouverait sa liberté naturelle.
Comment permettre aux hommes d’être libres et égaux ?
Si le contrat social n’est possible qu’en acceptant de s’aliéner complètement, sommes nous encore libres en société ? Pour Rousseau, la réponse est oui ! Chaque citoyen, en échange de son indépendance, gagne une nouvelle liberté : la liberté civile.
Qu’est-ce que la liberté civile ?
La liberté civile s’exprime de deux manières :
- La capacité à surmonter des obstacles que je ne pouvais seul. Seul, j’étais indépendant (libre), mais limité par mes aptitudes naturelles.
- Le droit de participer à la volonté générale, de créer mes propres droits, de rédiger mes lois. En clair, être citoyen.
Il faut bien distinguer la liberté naturelle qui n’a pour bornes que les forces de l’individu, de la liberté civile qui est limitée par la volonté générale.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 1, Chapitre 8)
La volonté générale et la création des lois dans le contrat social de Rousseau.
La volonté particulière tend par sa nature aux préférences, et la volonté générale à l’égalité.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 2, Chapitre 1)
Qu’est-ce que la volonté générale ? La volonté générale, ce n’est pas la volonté de tous. La volonté générale, c’est la volonté du citoyen qui prend ses décisions, non dans ses intérêts particuliers, mais dans l’intérêt général.
Chez Rousseau, le pouvoir législatif est dans les mains du peuple. Seul le peuple est légitime à créer les lois. Ce pouvoir ne revient ni à un groupe de particuliers (aristocrates), ni à un monarque béni des dieux.
La première et la plus importante conséquence des principes ci-devant établis est que la volonté générale peut seule diriger les forces de l’Etat.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 2, Chapitre 1)
Tous ceux qui consentent à cette association, consentent à respecter la loi. Cela ne devrait être difficile, puisque la loi résulte de la volonté générale. Ainsi, en respectant la loi, je respecte ma volonté. (Du moins, en tant que tout, car je me suis aliéné complètement.)
Ainsi, dans ces circonstances, les citoyens sont libres et égaux. Libres car ils suivent leurs volontés : les lois. Égaux car chacun est une partie d’un même corps, payée au même prix. Il ne reste pour Rousseau qu’à expliquer comment ce peuple souhaite s’organiser. Pour cela, il lui faut traiter de la question du gouvernement.
Quel gouvernement pour nos sociétés ? et comment le mettre en place ?
Qu’est-ce que le gouvernement ?
Le gouvernement n’est pas le souverain. Le gouvernement est le serviteur, le ministre du peuple souverain. Il est un représentant. Ses actions sont limitées par ce qui a été décidé par le peuple. Il sert à la communication et l’exécution des décisions.
Le peuple est souverain. Le gouvernement est l’officier du peuple. Il suit ses consignes : les lois.
Qu’est-ce donc que le gouvernement ? Un corps intermédiaire établi entre les sujets et le souverain pour leur mutuelle correspondance, chargé de l’exécution des lois et du maintien de la liberté, tant civile que politique.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 1)
Sans gouvernement, il n’y a qu’une volonté, qu’une décision, qu’une idée. Pour prendre vie, il lui faut la force, l’énergie de l’exécution, il faut transformer l’idée en action.
Le peuple souverain représente le pouvoir législatif et le gouvernement le pouvoir exécutif : la force qui exécute les lois. Si cela n’est pas respecté, si le peuple ne fait plus les lois ou si chacun les exécute à sa manière, nous tombons dans le despotisme ou l’anarchie.
Si le souverain veut gouverner, ou si le magistrat veut donner des lois, ou si les sujets refusent d’obéir, le désordre succède à la règle, la force et la volonté n’agissent plus de concert, et l’Etat dissous tombe ainsi dans le despotisme ou dans l’anarchie.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 18)
Comment nait le gouvernement ?
Si l’état existe par lui-même, c’est à dire comme on l’a vu, de part un contrat entre chaque membre; le gouvernement existe seulement parce qu’il y a un état. Il est la conséquence du premier acte. Le peuple institue le gouvernement. Le gouvernement se forme, se crée, existe, seulement grâce à la volonté du peuple.
Cette institution se fait en deux étapes :
- Le peuple décide par une loi de la forme de gouvernement qu’il souhaite : démocratique, aristocratique ou monarchique. Nous verrons, dans la prochaine partie, quelle forme de gouvernement Rousseau préconise.
- Puis, à la suite de cette même loi, le peuple décide de la fonction du gouvernement.
Le peuple peut établir et destituer le gouvernement à sa guise.
L’acte qui institue le gouvernement n’est point un contrat mais une loi, que les dépositaires de la puissance exécutive ne sont point les maîtres du peuple mais ses officiers, qu’il peut les établir et les destituer quand il lui plaît, qu’il n’est point question pour eux de contracter mais d’obéir et qu’en se chargeant des fonctions que l’Etat leur impose ils ne font que remplir leur devoir de citoyens, sans avoir en aucune sorte le droit de disputer sur les conditions.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 1)
Les différentes formes de gouvernements.
Le gouvernement est composé d’un prince ou de magistrats. Plus il y a de magistrats, plus le gouvernement est faible. Pourquoi ? Car plus ils sont nombreux à le composer, plus les délibérations prennent du temps. Ainsi, l’exécution est lente.
Alors, pour Rousseau, il faut un gouvernement proportionnellement inverse à la taille de l’état. Plus l’état est grand, plus le gouvernement doit être petit (pour être efficace et traiter les affaires plus vite).
Je viens de prouver que le gouvernement se relâche à mesure que les
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 2)
magistrats se multiplient, et j’ai prouvé ci-devant que plus le peuple est nombreux, plus la force réprimante doit augmenter. D’où il suit que le rapport des magistrats au gouvernement doit être inverse du rapport des sujets au souverain. C’est-à-dire que, plus l’Etat s’agrandit, plus le gouvernement doit se resserrer ; tellement que le nombre des chefs diminue en raison de l’augmentation du peuple.
Le gouvernement peut prendre 3 formes :
- La démocratie : « tout le peuple où la plus grande partie du peuple forme le gouvernement. »
- L’aristocratie : « un petit nombre de citoyens forment le gouvernement. »
- La monarchie : « un prince tient tous les pouvoirs du gouvernement. »
Les formes sont plus ou moins intéressantes dans différents états.
On a de tous temps beaucoup disputé sur la meilleure forme de
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 3)
gouvernement, sans considérer que chacune d’elles est la meilleure en certains cas, et la pire en d’autres.
La démocratie semble un régime impossible aux yeux de Rousseau. Cela demanderait à chacun de rester assemblé pour traiter des affaires publiques. Pour se faire, la démocratie demande un état très petit où tous les citoyens se connaissent, avec des mœurs très fortes pour faciliter les décisions. Les moeurs constituent des règles sur lesquelles tout le monde s’accorde, réduisant ainsi les choix. Si le choix est plus restreint alors la décision est plus simple.
L’aristocratie est la meilleure forme de gouvernement du moment qu’elle est élective. A l’inverse, elle est la pire forme de gouvernement si elle est héréditaire. Par aristocratie héréditaire, on entend un groupe de personnes identique, riche et puissant, de génération en génération, de part des inégalités d’institutions.
La monarchie convient pour les états les plus grands. Cependant, il faut faire attention que l’ambition personnelle du Prince ne prenne pas le dessus sur les intérêts du peuple.
Il est plus aisé de conquérir que de régir.
Du Contrat Social, Rousseau (Livre 3, Chapitre 6)
Avec un gouvernement monarchique, le cas de la succession est périlleux. L’État est sans gouvernement dans l’intervalle des élections. Supprimer les élections mènerait à une couronne héréditaire où le peuple pourrait être gouverné par des enfants ou des imbéciles.
En résumé, quelles sont les grandes idées du contrat social de Rousseau ?
L’objectif du contrat social de Rousseau est de trouver un régime politique légitime et juste où les citoyens seraient libres et égaux. Avec ce texte, Rousseau essaie de combattre les inégalités de son temps.
Le contrat social est un pacte permettant à des individus de s’associer afin d’exister en tant que peuple, de créer une société. Les clauses de ce contrat demandent à chacun de s’aliéner complètement. Car si chacun d’entre nous donne tout ce qu’il a, alors nous sommes tous égaux. Ici, nous ne sommes pas en société, ce que nous possédons réellement, ce sont nos droits naturels : notre indépendance.
Le peuple est libre : il rédige les lois selon sa volonté, c’est-à-dire la volonté générale. La volonté générale n’est pas la volonté de tous. Ce n’est pas la somme de toutes les volontés particulières, mais la somme de toutes les volontés dans l’intérêt général, dans l’intérêt du bien commun.
Pour exécuter ses lois, il ne suffit pas d’avoir la volonté de les mettre en place, d’en rédiger le plan; il faut aussi l’énergie de l’action. C’est pourquoi, une société a besoin d’un pouvoir exécutif, d’un gouvernement pour avancer. Ce gouvernement doit être adapté selon l’état qu’il gouverne. Il est institué par le peuple lui-même. Le peuple peut, à sa guise, instituer ou destituer son gouvernement.
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